Le Linoléum : un matériau naturellement destiné à la linogravure

Le Linoléum : un matériau naturellement destiné à la linogravure

Une invention du XIXe siècle

Le linoléum voit officiellement le jour en 1863, lorsque l’Écossais Frederick Walton (1834–1928) en dépose le brevet. Son invention répond à un besoin concret : concevoir un revêtement de sol souple, facilement découpable et ajustable, disponible en grandes largeurs, tout en respectant des critères d’hygiène et de confort.
Malgré de nombreuses tentatives menées par d’autres inventeurs avec divers matériaux, c’est finalement Walton qui parvient à développer une formule efficace. Celle-ci repose sur un mélange de poudre de liège et d’huile de lin polymérisée — cette dernière devenant une matière gommeuse après cuisson et oxydation au contact de l’air chaud. La pâte obtenue subit ensuite plusieurs phases de repos, avant d’être malaxée avec des gommes naturelles et des résines (comme le copal ou la colophane). Elle est enfin calandrée sur une toile de jute pour former un revêtement aux épaisseurs régulières, généralement de 2, 3 ou 4 mm. Grâce à ses composants d’origine végétale et minérale, le linoléum peut être considéré comme un matériau naturel.

Le matériau qui a donné son nom à la technique

Souple, facilement découpable au cutter, lisse, et conçu pour être fixé sur un support rigide, le linoléum coche toutes les cases du matériau idéal pour la gravure en taille d’épargne.
Il n’est donc pas étonnant qu’il ait donné son nom à une technique à part entière : la linogravure.

plaque de linoléum courbée vue en tranche

Une matière idéale pour la taille d’épargne

Dans le cadre de son utilisation en gravure en taille d’épargne, le linoléum est généralement choisi dans une teinte grise. Cette couleur offre un contraste optimal avec la plupart des encres appliquées en surface, facilitant ainsi l’évaluation de la qualité de l’encrage avant impression.
Côté épaisseur, le format de 3 mm s’avère le plus adapté pour graver des matrices : il assure une bonne solidité tout en permettant une profondeur de taille suffisante.

Un support renforcé et polyvalent

La toile de jute qui constitue le verso du linoléum joue un rôle essentiel, à la fois dans son usage initial comme revêtement de sol, et dans son détournement pour la gravure. Elle permet à la colle de bien pénétrer, garantissant une excellente adhérence, que ce soit sur un sol ou sur un support en bois.
Dans le cadre de la gravure, le linoléum est souvent monté sur une base rigide en bois, comme du contreplaqué. Ce montage offre plusieurs avantages :

Solidité, pour éviter toute déformation lors du passage sous presse ;

Rigidité, pour un positionnement stable et précis sur un angle de calage ;

Hauteur adaptée, pour l’impression sur presse taille-douce grâce à un dispositif de rails, où le bloc doit être ajusté (voir l’article : « Impression d’une plaque de linoléum »).

Un matériau thermoréactif, utile pour la gravure

Une dernière caractéristique particulièrement intéressante du linoléum réside dans sa souplesse lorsqu’il est chauffé. Cette propriété est précieuse lors de la gravure à la gouge, car un linoléum légèrement ramolli oppose moins de résistance à l’outil.
Certains artistes utilisent simplement un sèche-cheveux pour chauffer la surface, tandis que d’autres privilégient une plaque chauffante comme plan de travail — similaire à celles utilisées en taille-douce. Dans les deux cas, le résultat est le même : le matériau devient plus tendre, ce qui facilite les tailles précises
Une fois refroidi, le linoléum retrouve sa fermeté initiale, un point essentiel pour l’étape suivante du processus : l’impression — un sujet que nous aborderons dans un prochain article.

bloc de linoléum monté sur bas en bois

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